Jean Perguet, Journal du samedi 5 janvier 2019
Journal de Franz Kafka, traduit de l’allemand par Marthe Robert, Grasset, 2002.
C’est lors d’une proposition d’écriture de François Bon sur le Prométhée de Franz Kafka, « On rapporte l’histoire de Prométhée dans quatre légendes… », ce court texte en retournement, « comme des accords de guitare, dixit F.B. qui manipule sa Fender », que j’ai eu subitement envie de picorer à mon tour dans le journal de Kafka que Magali est allée exhumer de la réserve et qui j’espère trouvera à nouveau des lecteurs.
Dès la page 6 je trouve déjà le thème de la Lettre au père que je viens de finir par ailleurs. « Quand j’y songe, il faut dire qu’à maints égards mon éducation m’a causé beaucoup de tort. Ce reproche s’adresse à une foule de gens, à savoir mes parents… »
Mais, ce que je ne peux traduire là, c’est que l’on voit, dans l’intégralité du journal, dans sa chronologie, comment ce fragment s’est construit en trois épisodes, réécrit, transformé, complété. On devine alors, le long travail de fourmi, la difficulté de faire accoucher avec sincérité des sentiments complexes et transgressifs.
Il en sera de même à plusieurs reprises où l’on voit émerger les fondations d’une nouvelle, puis ses ornements. C’est ce que laisse transparaître la structure « journalière » du journal et ce qui m’a passionné. J’ai cru assister parfois au travail d’écriture.
C’est ce que ne permet déjà plus l’effacement systématique des brouillons, des « révisions » de nos tapuscrits informatiques.