DE COSTER Maggy

incertain regard – N°22 – Eté 2023

Carte blanche à Hervé Martin

Maggy De Coster

Poèmes extraits des livres A fleur de mots, et de Les versets simplifiés du soleil levant respectivement parus aux Éditions du Cygne en 2021 et 2016.

Comment effacer les taches d’ombre sur la face
Luminescente des jours de décembre
Miroir réfléchissant dans l’opale du matin ?

Autant en emporte la neige
Qui crisse sur les fines semelles de l’autre
De loin venu, pourchassé par le destin

Le refrain du silence résonne
Comme un fracas au sein d’une forêt
Captive des bûcherons

Les oiseaux ahuris ne retrouvent plus les épaules
Des arbres pour déposer la partition de leurs chants
Point de racines pour contenir la furie de l’onde

 

Jardiner dans les criques du matin
C’est insérer une romance
Dans les plis d’une coquille vide
Au déclic des roses éphémères
Aphorisme d’un astre aperçu
Dans le sérail des anges

Fuir la monotonie des heures
Pour se retrancher dans les crevasses
D’une aube finissante
Et caresser la vie à rebrousse-poil
C’est nourrir les chimères avec l’or de l’esprit

Qui dira que le vent se terre au creux
De la marée pour repartir en force
Et s’en aller fracasser les rêves
En éclosion dans les chaumières

Peut-être que le néant se cache
Derrière la pancarte d’un inconnu
En rémission dans un monde décousu

 

L’aube écarte la nuit
Comme une main puissante
Repousse un avatar
Pour laisser entrer la lumière
Dans les zones d’ombre
Où la beauté se voudrait pérenne
J’entends le rire des sape-joie résonner
Dans la salle des pas perdus
Quand je cherchais une réponse à donner
À ceux qui avancent à grands pas dans la citadelle
Je crois que le vent n’effeuillera pas la fine fleur
De la bonté mais transportera dans ses plis
Liberté et délivrance aux martyrs

Moment intense chassant la persistance de l’inquiétude
Le jour s’oppose à la nuit mais pour combien de temps ?

Reviendra-t-elle étendre son spectre sur la ville
Comme en terrain conquis ?
Une sentinelle réclame la permanence de la lumière
Et rêve que le jour ne fléchisse pas
À la faveur des ténèbres.
Le rideau ne doit pas tomber

Hunwick (Royaume-Uni) le 10 août 2019

 

Que dire de tant de pensées stériles
Qui parsèment les lobes du cerveau
L’absurde gangrène les espaces de vie
Le verbe se fige dans le vide des convenances
La force des idées se perd dans les soubassements
de la colère

Les dires du coryphée se diluent dans les méandres
du désenchantement
Point de garde-fou dans l’avant-scène : le péril se décrète
La nuit chasse le jour et tout recommence

La demande est instante
L’instant n’attend pas
La coupe se vide dans le vide
Et le vide se remplit du contenant et du contenu

 

Quand la terre disparaîtra
Je gémirai dans les limbes
Les souvenirs du passé seront portés disparus
La vie sera-t-elle aux abonnés absents ?
Quoi qu’en pensent d’aucuns
Le temps continuera sa course inexorable
Et chacun aura peut-être fait son temps
sans avoir rien fait de son temps
Est-ce le temps qui nous marque
ou nous qui le marquons ?