Jean Perguet, Journal du mercredi 5 décembre 2018
Le vicomte pourfendu d’Italo Calvino, traduit de l’italien par Juliette Bertrand, Le Livre de Poche, 1982.
Si Les villes invisibles n’étaient pas une proposition traditionnelle d’atelier d’écriture, je n’aurais peut-être jamais connu Italo Calvino. Mais après avoir été séduit par ces villes autant que par les nombreux dessins qu’elles ont inspirés, je ne pouvais plus ignorer cet auteur italien et ne pas aller plus avant. Je me suis donc plongé dans le témoignage de La journée d’un scrutateur tout en « scrutant » moi-même la récente élection législative française et me suis délecté ensuite, délecté est le mot, dans ce conte satirique, politique, philosophique qu’est Le vicomte pourfendu.
Un conte picaresque, une idée simple, le Vicomte, rentrant de croisade, est pourfendu en deux. Sa mauvaise moitié, l’Intérêt, règne alors, quand sa bonne moitié, la Charité, l’évite.
Jusqu’à la conclusion que je ne peux résister à vous livrer, même si dévoiler un livre ne se fait pas, car dans toute fable, c’est la morale qui vous marque : « C’est ainsi que mon oncle Médard redevint un homme entier, ni méchant ni bon, mélange de bonté et de méchanceté, c’est à dire un être ne différant pas en apparence de ce qu’il était avant d’être pourfendu. Mais il avait l’expérience de l’une et de l’autre moitié ressoudées : aussi devait-il être sage. Il eut une vie heureuse, beaucoup d’enfants, et gouverna avec justice. Notre vie s’améliora. »
J’ai bu ce court récit d’un trait, une pétillante et rafraîchissante boisson mi-amère, mi-sucrée, épicée. Un régal.