incertain regard – N°14 – Mai 2017
Mozart à Vénus
Les liens musicaux un par un
prennent l’onde, et les rangs sont si près
sur le trait de l’amour, qu’à l’oreille un ou mille
ont le même détour, de ta tulipe blonde
à mon archet qui sonde. L’arpège de la vie
ordonne la seconde et hante cette touche
au lit du contre-jour, sur le piano noir
qui reflète alentour ton sublime visage
à la crête du Monde.
La Musique est le Vin d’un vase extravagant.
Son murmure ondulé rend le cœur élégant et, mêlés,
l’une et l’autre bercent ta silhouette.
Cette partition est un ciel rectiligne,
où l’artiste exalté a usé sa baguette à dessiner
la note la plus digne envers toi.
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La mémoire de l’océan à Cadix
J’ai rêvé l’océan dans un monde d’amour,
un parterre infini de fraîcheur et de sable,
et le dialecte grave
en l’écume du diable, et surtout ta présence
en reflet, en retour ! Mes yeux las de sommeil,
éclairés tour à tour par cette rêverie
d’un bonheur insondable, seuls se sont évadés
sur le repli aimable de la mer,
cette nuit, qui m’offrait son séjour !
Que la solitude la plus âpre me blesse,
jamais, je ne prierai
l’envers de mon ivresse ! Île d’oiseaux heureux
dans une eau opaline ! Je n’ai pas inventé
ce songe de plaisir : je l’ai ressenti hier
pour demain, chère Ondine, comme toi
respirant la nuit d’un avenir.
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Le partisan libéral
Le vagabond promène une ombre, une blessure.
Par-dessus ses haillons, son bagne s’évapore
comme tombe une cape
au pavé de l’aurore, avec un froissement
d’espoir et de ramure. Les semelles mouillées captent
cette eau impure, et le fantôme sombre au fond
comme une amphore. Cet homme maintenant
que la clarté dévore, annonce le courage
au seuil de la rupture.
Et retenant ses pleurs dans un coin de sourire,
vite il tourne le dos
aux chacals en délire, doucement
se rappelle enfin qu’il aime vivre !
La lunette l’invite au centre de la cible,
paralyse sa grâce au synthétiseur exalté :
cent microprocesseurs d’un invincible bonheur !
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